Notre ancêtre Pierre Allard, fils de Pierre Allard et de Mathurine Verdon est né en 1653 dans ce petit village de Saint-Hermine. Il n'a pas usé ses culottes sur les bancs d'écoles, il ne savait pas signer, cependant, il apprit un métier, celui de tonnelier comme son père. Il a beaucoup entendu parler de ce vaste pays aux terres fertiles où il n'y a pas de lourds impôts à payer pour les folies du roi; seulement la dîme aux curés et la rente aux Seigneurs qui était très peu élevée. En plus, il y avait les renseignements que nous apportait le curé, il nous vantait les grands espaces et la possibilité d'acquérir un grand domaine à bon compte. On disait du bien de la compagnie qui embauchait des apprentis-colons pour le Canada. Même s'il avait pu gagner honorablement sa vie en France comme tonnelier, il rêvait d'aventures et de grands espaces. En 1680, à l'âge de 26 ans, il signe un contrat de trois ans comme apprenti-colon pour venir s'établir au Canada. En mai 1680, Pierre s'embarque à Larochelle pour le grand voyage.
Le Grand Voyage
Le voyage fut dur et pénible, le plus difficile c'était le temps interminable de la traversée; plus de cent jours à vivre dans une puanteur insupportable, il n'y avait pas seulement des passagers, il y avait aussi des animaux qui étaient expédiés aux colonies déjà établies. La maladie était aussi du voyage; quelques-uns sont morts du scorbut et d'autres de dysenterie, ils ont été immédiatement ensevelis en mer. La nourriture infectée, de l'eau potable qui n'avait pas tardée à se corrompre, des viandes et du poisson salé sont les résultats de ces maladies et de ces décès. Ce n'est qu'à leur arrivée sur les bancs de Terre-Neuve, qu'ils ont pu mettre le pied à terre, boire de l'eau fraîche, pêcher de la morue, manger du poisson frais. Le premier travail de Pierre en Nouvelle-France. Arrivé en Nouvelle-France, Pierre Allard s'est établi sur la Côte de Beaupré, l'un des plus beau coin du pays, à Château-Riché, là où il a travaillé pendant trois ans chez Zacharie Cloutier comme apprenti-colon. Le 4 mars 1683, Pierre obtient une concession dans la Seigneurie de Beaupré, propriété de Mgr de Laval. A la fin du contrat de trois ans, Pierre avait le choix de rester en Nouvelle-France ou de retourner dans son pays d'origine. La décision de Pierre fut facile à prendre; il suffisait de se souvenir du voyage; il ne voulait plus revivre cette expérience. A 30 ans, Pierre possède une terre et se construit une maison sur le coteau de Beaupré. Le 20 novembre 1683, il signe un contrat de mariage devant le notaire Étienne Jacob, avec sa future épouse Anne de La Voye, native de Château-Riché. C'est l'abbé Thomas Morel qui bénit cette union dans la petite chapelle de Sainte-Anne de Petit Cap (Beaupré). Contrat de mariage de Pierre Allard "Par devant Étienne Jacob, notaire en la seigneurie et Bailliage de Beaupré fut présent: Pierre Allard, tonnelier habitant en la paroisse de Notre-Dame du Château-Riché y demeurant, fils de Défunt Pierre Allard et de Mathurine Verdon pour lui et en son nom D'une part: Et René de Lavoye habitant de la paroisse Sainte- Anne du petit-Cap veuf de défunte Anna Godin Stépulant en cette partie pour Anne Delavoye sa Fille et de son consentement d'autre part; S'étaient assemblé avec eux: Zachari Cloutier, Jean Matteau, Berthélémi Moreau et François Laurin Comme témoin de Pierre. Les futurs époux promirent de réciproquement lui et l'autre par nom et loi de mariage lui faire solemniser en face de Notre Mère." (Le nom de La Voye change avec le temps, plus tard on retrouve: "Lavoie".) Acte original du mariage de Pierre avec Anne de La Voye C'est le cœur plein d'enthousiasme que les joyeux époux prirent possession de leur habitation à Château-Riché, au haut du coteau, vis-à-vis l'église actuelle. De cette courte union, deux enfants sont nés. Ils seront les parents de cette gigantesque descendance qui honorera au cours des siècles le courage de Pierre Allard et d'Anne de La Voye. Le 12 août 1684, Anne mettait au monde Marie: "L'an 1684, le 13e jour d'août, a été, dans cette Église, par moy, soussigné prêtre, faisant les fonctions curiales Baptisé Marie, fille de Pierre Alard et d'Anne Lavoye, sa femme, née le jour précédent. Le parrain a été René de Lavoye et la marraine Louise Cloutier." Un an plus tard, Anne se retrouva pour une deuxième fois enceinte, et malade; le 26 juillet 1685, le couple conclut un marché: aller vivre à la maison paternelle avec son mari. Elle pourra bénéficier des soins de sa sœur tandis que Pierre aiderait la belle-famille aux travaux de la terre. Le 19 juillet 1686, le deuxième enfant venait au monde, ils le nommèrent Jacques-Pierre. Et de cette naissance, Anne ne s'est jamais remise, elle décédait donc quinze jours après avoir mis au monde celui à qui l'on doit cette descendance. Pierre, veuf à 33 ans avec une fillette de deux ans et un bébé de quinze jours sur les bras, accompagnait la dépouille de celle qu'il avait tant aimée, à la même église qui trois ans auparavant avait entendu leurs serments de fidélité. (Petite chapelle de Sainte-Anne de Petit-Cap.) de Beaupré. Anne y repose depuis trois siècles, le cimetière n'ayant pas été relevé. Le 24 août suivant, René de La Voye, père de Anne, vendit un arpent et demi de sa terre à Pierre Allard. Le même jour, Pierre vendait sa terre à Château-Riché à Jean Matteau pour la somme de 130 livres ($26.00). Par la suite, Pierre acheta le reste des terres de René de La Voye pour la somme de 400 livres ($80.00), vis-à-vis le Mont Saint-Anne. Dans l'avant-midi du 24 août, il s'est rendu au bailliage du Château-Riché où se signent, en la salle d'audience, les contrats de vente et d'achat. "Par devant Etienne Jacob, notaire royal, Pierre Allard vend à Jean Matteau sa concession et habitation, franche de dette, et lui appartenant par contrat d'acquisition qui lui a été faite par Sieur Antoine Baillon. Cette vente faite moyennant la somme de 130 livres ($26.) payable à savoir: la somme de 10 livres ($2) en la fête de St-Michel prochain; et la somme de 120 livres ($24.) dans un an." Pierre achète la terre de René de La Voye. (24-08-1686) "Sur le midy vingt-quatrième jour d'aoust mil six cent quatre- vingt-six, en l'auditoire du bailliage de beaupré au Château- Richer, par devant Etienne Jacob, notaire Royal, pour la somme de 400 Livres ($80.) Pierre Allard se porte acquéreur pour luy ses hoirs, et ayant cause, des biens de René de la Voye, soit un arpent et demy de front sur le fleuve sur 30 arpents de profondeur, joignant d'un côté à Jean Barrette et d'autre cô té à André Berthelot di Leloutre L'autre moitié de la terre appartenant aux enfants Lavoie par droit d'héritage de puis la mort d'Anne Godin, leur mère." Quatre ans après cette rude épreuve Pierre contracta un deuxième mariage devant le notaire Etienne Jacob, le 8 novembre 1690 avec Marie Marthe de Lugré, native de Château-Riché; fille de Jaques de Lugré et de Marie Taupier. Le lendemain, le couple se retrouvait devant l'autel de la petite chapelle pour bénir leur union. Mariage religieux à Sainte-Anne-de-Beaupré "L'an 1690, le 9e jour de novembre, après la publication des trois bans faits au prosne, le 17e, 24e et 29e septembre dernier entre Pierre Allard, veuf de Anne de La Voye, agé d'environ 40 ans (il avait 37 ans) de cette paroisse d'une part; et Marthe de Lugré, agée d'environ 22 ans, fille de deffunt Jacques de Lugré et de Marie Taupier, ses père et mère de la paroisse de la Sainte-Famille de l'Isle Saint- Laurent, d'autre part; ne s'étant découvert aucun empeschement légitime, Je, Germain Morin, prestre du Séminaire de Québec faisant les fonctions curiales en cette Eglise ay pris leur mutuel consentement par paroles des présent et leur ay donné la bénédiction nuptiale selon la forme prescrite de notre Mère Ste Eglise, en présence de René Lavoye, beau- père de l'Epoux, d'Estienne Godard, son beau-frère, de Jean Barette avec Jacques de Lugré, frère de l'Espous, lesquels à la réserve des dits La Voye, père et Godard, beau-frère qui ont signé ont déclaré ne sçavoir escrire ny signer de ce interpellé selon l'Ordonnance. (Signé) René de la Voye, estienne godard, Morin, ptre." Cinq enfants sont nés de cette union: Michel, né le 11 novembre 1691, Jean, né le 30 décembre 1692, Joseph, né le 25 novembre 1694, François, né le 12 janvier 1697 et Eustache né le 7 mars 1699 et, c'est à la naissance de ce dernier que la mère ne se releva pas. Pendant trois mois, se fut une lutte contre la mort. Hélas, rien n'y fit, et le 18 juin 1699, elle rendait l'âme. Pierre vit une période plus cruciale que celle qu'il a vécu à la mort de sa première femme, Anne de La Voye, car si sa fille Marie pouvait parer aux soins du ménage et son fils Jacques-Pierre donner son coup de main pour les travaux des champs, il fallait trouver une personne d'expérience pour administrer une communauté de deux adolescents et de cinq enfants dont un de trois mois. Cette personne expérimentée, il la rencontra en la personne de Marie Madeleine Pinel, veuve de François Vandal, habitant la seigneurie de Neuville. (Pointe aux Trembles de Québec). Elle avait quatre enfants à 37 ans. Le 28 août 1700, en la maison de Me Guillaume Morel, par devant le notaire Royal Etienne Jacob et le greffier Marois, les deux futurs époux procédaient à leur contrat de mariage, et le lendemain faisaient solenniser leur union. Madeleine Pinet devait lui apporter l'aide précieuse dont il avait besoin en plus de lui donner deux filles; Geneviève née le 25 septembre 1701 et Madeleine née le 20 juin 1703. Cette dernière était jumelle mais son jumeau décéda à la naissance, il fut inhumé en même temps que sa sœur Madeleine fut baptisée. La saison estivale de 1703 fut avantageuse. Lorsque vint le temps des moissons, Pierre et son fils armés de leurs faux et de faucilles s'attaquèrent à la tâche avec la charrette à deux roues sur laquelle ils avaient attelé le bœuf, ils ont engrangé le foin et le blé pour la période hivernale. Il restait encore la récolte de pois qui courrait sur les champs et risquait de geler et cependant, Pierre n'était pas à la besogne. Seuls son fils et sa fille étaient au travail; leur brave père gisait sur son lit de plume et attendait la visite du docteur Moreau de Château-Riché. Il lui fut prescrit quelques remèdes et un repos complet. Pierre comprit que son heure était venue. Il avait raison d'être content de sa vie: huit enfants lui survivraient dont cinq porteraient au loin la mémoire de son nom. Leurs mères avaient été des modèles d'amour et de dévouement. Pierre pouvait mourir en paix. Sa dernière maladie fut sans doute de courte durée si l'on s'en tient au prix versé pour les achats de remèdes: "Médicament dû au sieur Moreau fourni à Pierre Allard: 4 livres 10 sol (0.90¢)." Pierre Allard s'éteignit au milieu des siens dans l'avant-midi du 18 septembre de 1703. Le lendemain, un convoi funèbre descendait de sa propriété pour le reconduire à sa dernière demeure accompagné de sa veuve de 41 ans, de sa fille Marie (19 ans), de son fils Jacques-Pierre (17 ans) tous deux de son premier mariage et de son second mariage, Jean (11 ans), Joseph (9 ans), François (7 ans) et Eustache (4 ans) ainsi que de plusieurs amis venus témoigner leur estime à ce vaillant citoyen. Le corps de Pierre Allard fut déposé auprès de ses deux épouses et de son fils Michel, premier enfant de son deuxième mariage avec Marie Marthe de Lugré. La terre de Pierre Allard appartient à son fils Jaques-Pierre qui l'habita de nombreuses années pour ensuite la léguer à son tour à Pierre-Jacques, son fils. Ce dernier la vendit en 1738 à un monsieur Malbœuf; celui-ci, la revendit à Louis Paré le 27 mars 1740. A partir de 1750, toute la terre appartiendra à la famille Giguère qui se la passe de père en fils. Jusqu'en 1960, elle appartenait à Charles Côté qui la revendit à Me René Amyot. Désirez-vous savoir où demeura Pierre Allard? De la Chapelle Commémorative de Sainte-Anne de Beaupré, suivez l'avenue Royal en direction Est pour environ 3 kilomètres. Montez la côte Sainte-Anne que vous rencontrerez à votre gauche pour un arpent ou deux; à votre droite vous avez le chemin qui conduit à sa propriété.